
« la gloire de Dieu, c’est l’Homme vivant et la vie de l’Homme, c’est de voir Dieu »
Au cœur de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, ce 21 janvier 2022, le pape François a officiellement déclaré Saint Irénée, second évêque de Lyon, 37ème docteur de l’Eglise universelle, avec le titre de « doctor unitatis », docteur de l’unité[1] car « Il a été un pont spirituel et théologique entre les chrétiens d’Orient et d’Occident. Son nom, Irénée, exprime cette paix qui vient du Seigneur et qui réconcilie, rétablissant l’unité ». Le pape François souhaite « Que l’enseignement d’un si grand Maître encourage de plus en plus le cheminement de tous les disciples du Seigneur vers la pleine communion.»
Saint irénée (130-202) est considéré comme le premier grand théologien de l’Occident mais il est né en Asie mineure et fut un disciple de saint Polycarpe de Smyrne qui fut lui-même proche de l’apôtre saint Jean. Il fut, en particulier l’un des plus grands défenseurs de la foi chrétienne face aux doctrines gnostiques qui se répandait à la fin du second siècle. Ses travaux, source d’une connaissance de ces doctrines, sont regroupés dans un traité intitulé « Adversus haereses » (Contre les hérésies. Dénonciation et réfutation de la gnose au nom menteur) qui est devenu l’un des grands écrits patristiques. Il s’est opposé à « la vision dualiste des gnostiques qui discréditaient systématiquement le monde, la culture, l’homme affirmant que seuls certains pouvaient être sauvés » (Marie-Laure Chaleb, professeur de théologie patristique à l’Ucly[2]. Irénée ne s’oppose pas à la gnose (connaissance) en tant que telle, mais veut éclairer les fidèles sur une conception élitiste et trompeuse de celle-ci. Dans une approche résolument positive, il pose un regard bienveillant sur la création voulue par Dieu comme bonne et sur le péché présenté comme une blessure plus qu’une rupture avec le projet divin. Il est intéressant de mettre en valeur cette figure pacifique (sens de son nom) qui voulut apaiser les tensions existant déjà dans l’Eglise, en particulier en intervenant auprès du pape Victor sur la question toujours irrésolue de la date de Pâques. C’est aussi lui qui est chargé de porter la Lettre sur les martyrs de Lyon (Pothin, Blandine et ses compagnons) de 177. Irénée est aussi l’auteur d’un des premiers résumés de la foi chrétienne : la Démonstration de la prédication apostolique, que l’on n’a longtemps connue que par Eusèbe de Césarée jusqu’à ce qu’on redécouvre en 1904, une version arménienne, publiée en 1907. C’est enfin à lui que l’on doit la première liste de la succession des évêques de Rome.
On peut voir dans cette promulgation inédite d’un théologien de l’Eglise indivise et de la foi ante nicéenne, un signe fort de réconciliation entre Orient et Occident à quelque temps des 1700 ans du concile de Nicée qui sera célébré en 2025. Malgré les tensions récurrentes entre les patriarcats de Moscou et Constantinople, c’est une invitation à nourrir la communion entre les Eglises dans ces sources les plus anciennes et à vivre un témoignage commun dont notre monde divisé et pessimiste sur l’avenir de l’humanité a bien besoin. Le diocèse de Lyon lui a rendu hommage en 2020 au cours d’une année jubilaire[3] avec la production d’un film et diverses conférences. Que ce nouveau docteur contribue à l’unité de tous les chrétiens et à la paix entre les nations ! Alain Viret
[1] https://www.vaticannews.va/fr/vatican/news/2022-01/saint-irenee-lyon-docteur-eglise-congregation-vatican.html
[2] Université Catholique de Lyon.
[3] https://lyon.catholique.fr/non-classe/2022/01/21/irenee-de-lyon-docteur-de-lunite/ :et https://www.youtube.com/watch?v=i3PXfBxbFTk